jeudi 30 septembre 2010

REMARQUES EN PASSANT : B

REMARQUES EN PASSANT

ABECEDAIRE

Par Alain Sagault

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BEAUTÉ

La beauté a toujours été mon unique raison de vivre. J’entends par beauté non seulement celle des choses, mais la beauté des êtres et des sentiments. Je ne sais pas si Woerth et Bettencourt sont honnêtes, je ne sais pas s’ils ont enfreint la loi. Je sais que rien ni personne ne m’empêchera de les trouver indiciblement laids, comme tous les hommes et femmes de pouvoir et de profit.

Voir RAISON D’ÊTRE.

BEAUTÉ

« Un chef-d’œuvre doit-il être beau ? » déclare sur France-Inter le conservateur du Musée Pompidou de Metz, qu’on sent tout heureux de sa petite provocation. Et de continuer à se gargariser : « C’est la grande révélation des cinquante ou cent dernières années » proclame-t-il. À la louche, cas de le dire…

« Nous avons voulu questionner l’histoire de l’art… » renchérit une pimbêche, et l’autre couillon de reprendre avec cette légèreté sentencieuse qui fait tout le charme des cuistres : « Ce qui m’intéresse, c’est quand l’art fait d’entrée réfléchir. »

Ça, c’est envoyé ! Un tel niveau de réflexion, ça fait réfléchir…

Quel enseignement débile, quels enseignants incultes nous ont fabriqués de pareils crétins ?

Évacuer la notion de beauté, et supprimer par là même tout critère d’appréciation, voilà la grande affaire et l’authentique chef-d’œuvre des clercs de l’art contemporain, ces marchands du Temple, ces pharisiens du marché de l’art.

C’est au fond le fin du fin des Lumières : faire en sorte que la « réflexion » court-circuite la contemplation, en la précédant. Analyser, comprendre, disséquer, pour ne pas avoir à sentir, pour ne pas avoir à vivre – pour mieux se réfugier dans cette confortable abstraction qui permet à l’homme d’aujourd’hui de se confronter le moins possible à la réalité de la matière et à ses contraintes.

Triomphe de la « conscience », apothéose de l’ego : je pense, donc je suis.

L’art véritable dit tout le contraire : je sens, donc je suis. L’art s’intéresse au fait que même quand je ne pense pas, je suis.

Mégalomanie de l’esprit qui voudrait se débarrasser du corps, de sa réalité et de ses limites.

La beauté est gênante parce qu’elle implique la laideur. La beauté s’oppose au pouvoir, parce qu’elle ne se décrète pas, parce qu’elle lui échappe.

Un chef-d’œuvre ne peut être que beau, parce qu’un chef-d’œuvre donne à vivre.

L’art n’a pas à faire réfléchir, il doit faire vivre. L’art ne s’adresse pas qu’à la tête, ne concerne pas le seul intellect. L’art n’existe que s’il parle à l’être entier, corps et âme, réflexion et sentiment, esprit et matière. Alors naît cette égrégore fragile et irrésistible, la beauté. Qui n’est pas dans la réflexion, mais dans l’au-delà de la réflexion, pas dans la pensée mais dans la création.

Il n’y a pas d’art intellectuel, parce que l’artiste intellectuel, celui qui se contente de réfléchir, est tout bêtement un impuissant. Voyez Buren, Warhol et autres maîtres esbroufeurs.

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